Né en pleine Révolution, fils de Delphine de Sabran, Astolphe de Custine aura connu la Terreur, l'Europe des Idées, les voyages en Italie et en Russie, la dictature de Napoléon et, au crépuscule de sa vie, l'ombre de la Princesse Mathilde. C'était un voyageur, un excentrique, un homme libre qui eut le courage, assez peu fréquent dans le milieu dont il venait, d'afficher son homosexualité et de vivre en couple pendant trente ans. "Je ne suis pas révolutionnaire mais j'ai été révolutionné", disait-il. Anka Muhlstein nous fait bien comprendre le glissement d'une civilisation à l'autre : d'un côté, ce sont les délices de l'Ancien Régime, un art de vivre, et au bout du compte la guillotine. De l'autre, les voyages en solitaire, des rencontres singulières, le vertige d'une caste qui se sait mourir, la traversée de l'Europe. De quel parti était vraiment Astolphe de Custine ? On le crut dilettante de l'écriture mais son la Russie en 1839 fut un succès. On le crut prisonnier d'une certaine société mais, avant l'heure, dans un siècle devenu bourgeois ; il fut un homme détaché des conventions, un homme libre.