"Ce que je crois est, pour l'essentiel, ce que je croyais à vingt ans. En me retournant sur mes croyances, j'ai rencontré mon premier amour, la France. Un peuple glorieux, et ce qu'il en reste. C'est peut-être ici que le déchirement a été le plus pénible. J'ai dû m'y résigner : aucun sujet collectif ne me porte plus sur ses épaules, et la seule révolution encore possible, c'est la révolution ontologique, celle qui mène directement aux gens, celle pour laquelle, à Esprit, j'ai travaillé pendant trente ans. Par-derrière, il y avait ce Dieu dont on m'avait trop parlé au temps de ma jeunesse pieuse, et dont je n'avais encore jamais parlé, par révérence, par crainte peut-être. Et pourtant, si l'homme semble lointain, comme Dieu est proche ! On oublie que l'état naturel du cosmos c'est la nuit, comme le faisait remarquer Victor Hugo, et que toute lumière nous vient d'ailleurs. Cette lumière je la vois derrière ce qui aide à penser la société et à la réformer, Illich, Castoriadis... Ce n'est pas pour moi l'alternative pathétique du salut, mais la garantie de la liberté raisonnable et du bonheur autonome."
J.M.D.