« Les essences d'espèces rares et d'espèces communes, je les aurai cherchées dans le sexe des filles, et les autres traces, signatures, preuves, sentiers de l'odeur dans l'autre odeur, urines évaporées ou tièdes, lieux louches, lits à sueurs et autres restes de haltes amoureuses, de passages solitaires, de brûlure, d'écume, de jubilation stupéfaite. » Ainsi parle Jules-Henri Mangin, né près de Bourg-en Bresse, retraité, se remémorant sa vie entière à traquer les odeurs de femmes, et surtout un certain été de 1960. Un été jurassien, sec, enflammé, jaune. Cet orphelin tranquille servait la messe et aidait à la mise en scène d'une pièce de Roger Vailland, qui vivait non loin de là, à Meillonnas. Entre le gamin qu'obsèdent les odeurs du vice et le libertin au regard froid, au visage d'épervier, se noue une amitié faite d'initiation progressive au plaisir. On joue, on fouette, on sépare les corps qui transpirent. Le petit amateur de théâtre ne sera plus jamais le même. Jusqu'au scandale qui éclabousse le village. Des années plus tard, des années consumées dans cette vaine et odorante recherche, Jules-Henri retrouve l'une des héroïnes de cette comédie qui a mal tourné, l'espagnole et brune Maria Elena. Tout recommence, et s'il le faut, pour l'amour du péché, les complices iront jusqu'au bout... Mi farce drôlatique, mi tragédie des sens dans un village français, citant les héritiers de Laclos et Saint Augustin, L'Eternel sentit une odeur agréable marque le retour de Jacques Chessex au roman, après l'autobiographie.