Chaque année, depuis la dernière guerre, les Russes émigrés, des musiciens, médecins, marchands, chauffeurs de taxi, princes, danseuses ou décorateurs, se retrouvent sur cette colline qui domine la baie du Lavandou. Depuis vingt ans, l'auteur partage cette existence du milieu russe, aux élans nostalgiques, brassant une population qui conserve son accent et accorde un large privilège à la dépense affective, au jeu, au chant. Là est l'originalité de cette place excentrique traversée par des voix, animée par les souvenirs mêlés des uns et des autres, et plus que jamais sensibilisée par l'actualité russe : la dissidence, l'émigration... Le mode sur lequel "la politique" est vécue, à la colline, épouse la nature environnante. Avant d'être de gauche ou de droite on est russe, émigré, à la colline russe. On n'est pas le spectateur d'un déchirement. On "vit" le drame, on le joue. Par un cheminement à la fois très personnel et méthodique, Yan de Kerorguen aboutit à un "roman" ethnologique, à une histoire, celle d'une vie de bohème menacée par le progrès.