"Piston" de l'Ecole centrale, Pierre Roche n'a pas eu l'enfance facile. Dans l'humble famille du Nord où il est né - de mémoire d'homme on y est journalier - l'honnêteté traditionnelle n'a été transgressée qu'une fois, par souci de vengeance et de justice ; cela suffit néanmoins pour faire de Pierre, l'enfant de choeur, le fils d'un "voleur de patates", et un révolté qui a des comptes à régler avec la société des nantis. Mais c'est avec leurs armes qu'il se fera "chasseur de têtes", requin parmi les requins. Après le collège et l'école d'ingénieurs, l'amour et le mariage vont lui en donner les moyens : Angèle Saint-Josse est issue d'une de ces riches lignées de filateurs, au prestige entamé par le progrès et la concurrence, en particulier celle des frères Desprez, les mafiosi du textile. Par un jeu d'écriture, Pierre réussit à vendre sous le manteau les biens de son beau-père, tour de passe-passe qui le mène en prison, mais pour peu de temps. Le vieux Saint-Josse s'incline devant le fait accompli et retrouve une seconde jeunesse grâce à son gendre, tandis que Pierre et Angèle fondent à leur tour un atelier de tissage, sur des bases qui n'ont plus rien à voir avec l'esclavage d'antan. La joie serait totale et sereine la réussite si la mère de Pierre ne venait à mourir, soudain. Son enterrement, scène inoubliable, qui est un peu l'expiation du vol de jadis, clôt le chapitre des origines pour le vieux père comme pour son fils. A présent, d'autres têtes attendent le chasseur, l'heure de la revanche est arrivée : "Un moment vient toujours où le bonheur ne suffit plus."