Il s'agit de la chronique d'une famille de Benfica (un quartier populaire de Lisbonne) : une famille d'artisans menuisiers-ébénistes habitée par le deuil. C'est une famille triste, où les hommes en particulier se révèlent décevants (fourbes, infidèles, lâches et souvent brutaux) et où la seule lumière vient des enfants. Le « cimetière de pianos » est un entrepôt attenant à l’atelier d’ébénisterie, où sont entassés de nombreux pianos anciens et inutilisables, qui semblent attendre de revivre. Le récit du père (mort depuis longtemps mais encore présent et qui semble tout savoir sur le devenir des siens) alterne avec le récit du fils, Francesco (mort d’épuisement en courant le marathon aux Jeux Olympiques de Stockholm, en 1912). Au cœur de ce roman : le récit du marathon fatal, kilomètre par kilomètre, où s'enchevêtrent la voix du fils qui décrit les sensations de la course et les pensées et réminiscences qui lui viennent en courant, et la voix un peu plus lointaine du père. Ce « cœur » du livre est une prouesse littéraire, et sa lecture en est profondément émouvante. Le livre s'achève sur une évocation de la famille qui suit à la radio le déroulement glorieux puis tragique du fameux marathon, et la naissance du fils nouveau-né de Francesco. Tout recommence, l'espoir renaît, et l'on peut penser que Francesco, d'une certaine façon, revivra à travers son propre fils, comme les vieux pianos « morts » revivent lorsque de leur dépouille est fabriqué un piano dont un artiste peut tirer des merveilles.