Les Minutes de sable mémorial (1894) est une suite de textes en vers et en prose par lesquels Jarry veut attirer notre attention sur l’aspect énigmatique de la condition humaine. Dans ce véritable « colin-maillard cérébral », comme il l’écrit, le lecteur joue à un jeu de « qui perd gagne ». La raison, la déraison, l’humour et le délire volontaire ou non, contrôlé ou non, sont de la partie. C’est un avant-projet d’Ubu Roi.
César-Antéchrist (1895) est bien différent. Cette pièce aux allures de mystère médiéval se nourrit des deux sujets à la mode de la fin du XIXe siècle, l’ésotérisme et le sacrilège des messes noires. En un délire continu où s’entrelacent savamment théologie, métaphysique et poésie de l’absurde, Jarry met à profit à la fois son érudition et son sens du burlesque. L’enjeu n’est pas mince : de la même manière qu’avec La Tentation de saint Antoine de Flaubert, le lecteur cherche à savoir le degré de complicité qui existe entre le narrateur témoin du délire et le délire lui-même.
Deux chefs d’œuvre, les plus beaux livres de Jarry.