Quoique Delteil ait fait la guerre, Les Poilus n’est pas un livre de souvenirs. Se réclamant explicitement de l’épopée, il s’ouvre sur les mots : « J’ai la tête épique. »
De cette proclamation découle un livre inclassable, à l’image de l’œuvre de son auteur. À la geste héroïque des soldats anonymes de la Marne, des tranchées et de Verdun répond celle de leurs chefs, Gallieni, Clemenceau, Foch, dont Delteil trace des portraits inoubliables. Il refuse de se restreindre à la seule description des combats : il veut restituer la guerre dans toute sa diversité et sa densité. D’où l’évocation d’aspects originaux comme les fameuses marraines de guerre, et un traitement original et surprenant de l’arrière, qui s’incarne en la femme, la « Poilue ». Cet arrière mythique, lieu de toutes les détestations dans une bonne partie de la littérature consacrée à la guerre, n’est pas caricaturé sous la plume de Delteil, mais finement restitué avec un mélange d’humour et d’émotion.
Les Poilus n’omet pas d’évoquer les ennemis de la France, en la personne de Ludendorff, ni ses amis, les Américains. Le vrai héros de ce livre est bien entendu le poilu, incarnation de la France terrienne qui s’est sacrifié pour le pays. « La victoire, la défaite : il s’en fiche. L’essentiel c’est l’honneur. »