« Le vide s?empare de moi. Vertigineux. Je n?ai qu?une hâte, me rendormir. Etre n?importe où sauf ici. Je me lève péniblement, mes gestes sont lents. Je dors, juste pour ne pas mourir. Et pourtant, le plus terrible, c?est que j?ai envie de vivre? » A la voir, sans doute, on ne remarque rien. Sibylle Claudel, qui fit le clown en présentant la météo sur une chaîne câblée, est une jeune femme gracieuse, souriante, légère. Mais sait-on dans quelles profondeurs elle va puiser l?envie de vivre ? Sait-on les blessures, les cicatrices qui la marquent définitivement, à l?intérieur ? On dirait un conte de fée à l?envers : son père l?a abandonnée et ne cesse ensuite de la décevoir ; sa mère qu?elle adore enchaîne dépression sur tentative de suicide ; enfant, elle perd tout, et surtout la confiance en elle-même ; la voici boule de nerfs qui s?évade sans cesse des foyers d?adoption, échange son corps de gamine contre un toit de fortune, slalome entre les drogués et les mecs louches, fête son anniversaire à la rue. La rue, le trottoir, elle y reste un an, paumée, déscolarisée, sauvage. Sibylle n?aurait pas dû en sortir vivante. Son témoignage, écrit avec l?aide de Christophe Tison qui l?a rencontrée à Canal Plus, émeut ; mais plus encore, il nous touche par une leçon de bravoure, par un miracle d?humanité partagée. Même pas morte. Bien vivante, même.