Fitzgerald a écrit Un légume (1923) au début de sa gloire, entre Les Heureux et les Damnés et Gatsby le Magnifique. Satire sociale et politique, cette comédie, qu’on peut lire comme un « livre d’humour », vise l’entourage passablement corrompu du président des États-Unis… Marié avec une sotte, l’employé aux chemins de fer Jerry Frost avait deux ambitions dans la vie : devenir facteur ou président. Il sera l’un et l’autre, dans des conditions parfaitement rocambolesques. Fitzgerald s’en donne à cœur joie dans l’onirisme, la bouffonnerie et le sarcasme, mais cette histoire n’oblitère ni l’analyse ni l’émotion. Elle se déploie dans un décor de guerre conjugale, que l’auteur connaît bien. De plus, elle anticipe étrangement son destin, si l’on veut bien admettre que Jerry a quitté la maison pour réaliser sous alcool ses rêves de gloire. À bien y réfléchir, c’est une touchante prémonition de la vie de Francis Scott Fitzgerald, en plus d’une parabole sur les pires défauts des présidents américains… quand ils en ont.