Plus de soixante ans ont passé depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale et la libération des camps. Les survivants de la Shoah ont presque tous disparu, et bientôt, il n’y aura plus personne pour témoigner de cet événement tragique et fondateur de notre histoire. Pourtant, la mémoire de l’Holocauste n’a pas fini de marquer les esprits. Ce livre, fruit d’un impressionnant travail de recherche (150 entretiens), nous révèle comment, aujourd’hui encore, l’héritage de la Shoah continue de peser sur les générations successives nées après la guerre. Longtemps, les survivants ont préféré garder le silence sur ce qu’ils avaient vécu. Contrairement aux idées reçues, ce silence ne leur a pas été imposé de l’extérieur mais s’est au contraire imposé à eux, comme un principe de survie et de reconstruction – ce que l’auteur appelle le « silence structurant ». Nombre de rescapés mais aussi d’orphelins de la Shoah n’ont ainsi commencé à parler que sur le tard, quand l’essentiel de leur vie était derrière eux et qu’ils craignaient moins d’affronter le souvenir de cette expérience traumatisante. Or, ce travail de deuil s’est souvent révélé infiniment plus douloureux qu’ils ne l’escomptaient. D’autant que ce long silence n’a pas empêché leurs enfants d’être à leur tour marqués, de manière profonde et durable, par cet héritage. Dominique Frischer est partie à la rencontre, en France, aux Etats-Unis et en Israël, de ces « enfants du silence », pour recueillir la parole de tous ceux qui ont grandi dans le silence : orphelins de la Shoah, deuxième génération (enfants de rescapés), génération « deux et demie » (enfants d’un orphelin de la Shoah et d’un parent non directement concerné, souvent élevés dans l’ignorance la plus totale de leurs racines), et troisième génération (petits-enfants de survivants). On découvrira, dans ces entretiens, avec quelle diversité et quelle intensité, selon les âges, les origines, les situations familiales et les parcours personnels, est vécu l’héritage de la Shoah.